Du choix de tes prénoms

Publié le par Jean Pierre Mazille

(0001/2000)

Du choix de tes prénoms

Oups !

QUESTION

MAIS AU FAIT LA PRINCESSE, QUEL ÉTAIT SON PRÉNOM ?

QUEL EST CELUI QUI LUI SIÉRAIT ?

Sa première lecture terminée, tout lecteur de ce roman, à quinze ans certainement par exemple ce qui fut mon cas, se pose souvent et à juste titre peut-être cette question : MAIS AU FAIT LA PRINCESSE, QUEL ÉTAIT SON PRÉNOM ? Et enchaîne aussitôt une relecture rapide pour trouver où son attention aurait failli… et bien sûr ne trouve rien.

Françoise GEVREY dans son superbe ouvrage L’ILLUSION ET SES PROCÉDÉS De la Princesse de Clèves aux Illustres Françaises édité chez JOSÉ CORTI, pp. 48-49 écrit : "Quelle est la fonction du prénom dans la création du personnage ? Les nouvelles se sont défiées des prénoms qui s’associaient traditionnellement à l’idée de roman, donc de fiction. Des raisons de bienséance interdisaient aussi de désigner par leur prénom des héroïnes qu’on préservait de toute familiarité. Enfin à supposer qu’on donnât un prénom, son choix n’allait pas sans difficulté pour allier tradition et vie privée. Nous ne saurons jamais rien du prénom de la princesse de Clèves (…)"

Pour les princes royaux le prénom était de mise, pour les princes "juste en dessous" infiniment moins sinon pas du tout, de Nemours pour l'occasion s’en sortit fort bien dans le roman !

 

Nombreux doivent se trouver des lecteurs à baptiser cette Princesse, comme par un "Françoise" par exemple dans le joli roman d’Henri BERNA UN SÉDUCTEUR édité chez EDILIVRE qui prolonge à sa manière, en le respectant profondément par ailleurs celui de Madame de Lafayette, pourquoi pas ?

 

Tout jeune, j’ai beaucoup fantasmé sur le si joli prénom d’Oriane qui appartenait à la belle dont était amoureux l’Amadis de Gaule, dont le roman éponyme fut introduit en France avec succès en 1540 juste avant la naissance de la Princesse, ça eût pu donner quelque bonne idée à ses parents, sans nul doute !

Et ce fut le premier épisode fort mal écrit d’ailleurs comme les 1999 autres qui suivent, mais il en existe beaucoup plus en réalité puisque je continue à en pondre sans l’aval de Mme de Lafayette qui n'en a jamais validé, et à ça combien je plussoie !

Du choix de tes prénoms
Milo Manara

Milo Manara

DU CHOIX DE TES PRÉNOMS

Dans un palais ducal où se baigne Venise
Ou un château de France aux airs ligériens,
De ceindre sur ton front des prénoms anciens
Ne fut point tâche aisée en sorte qu’ils t’irisent.

Près du berceau ton père et tes jumelles sœurs
De mère0, en théorie¹ des vies se repassèrent
Les glorieux passés afin que s’accolèrent
À ton — de Chartres — neuf, des lignées de haut cœur.

C’était en quinze cent quarante-trois, octobre
Où tu fis ton entrée : bouton d’or de beauté
Au doux regard d’azur dans leur Cour où l’été
Encore projetait de tendres chaleurs, sobre.

Galatée² à la peau blanche comme du lait,
Le chaud soleil d’Acis brûlerait sur ta crème ;
Tu croiserais souvent un jaloux Polyphème
À la flûte de paon croyant t’ensorceler.

Tu porterais Hélène apte à ourdir des guerres
Pour tes atours brûlants entre de nobles noms
Qui voudront sur le tien coucher le leur, crénom !
Peut-être pas à Troie, mais en d’autres parterres.

Te baptiser Diane aurait paru parfait
Aux vues de tous ceux qui, un bonheur de mémoire,
Au bain te surprendront, tu le leur feras croire,
La chasseresse en toi a toujours triomphé.

Ils eussent tous rêvé en rite sur leur Table
Guenièvre³ à la fleur de ton printemps scabreux
Leur longue Excalibur planter aux fonds de creux
Que n’aurait su chérir l’époux inévitable.

Des plumes en pléiade auraient tant adoré
Au couchant près de Blois promener dans leur barque
Béatrice de Dante ou Laure de Pétrarque,
Tu en rayonneras tous les parfums dorés.

On n’abordera pas un bel habit en Aude4,
Tu le vêtiras folle et jusqu’à tes douze ans,
En n’acceptant jamais qu’il ne fût plus présent
Ton Roland au bras de sa fidèle émeraude.

Et un mâle pouvoir sur un acte apposa
Oriane d’abord, suivit Shéhérazade,
Pour précéder son nom, en guise d’incartade
La litanie brisa ce dont il s’excusa.

Comme un laissez-passer, ça donnera des ailes
À quelques-uns de tes voyages palpitants ;
Son Art de stratégie l’avait depuis longtemps
Pensé ainsi pour toi gentille Demoiselle !

Monsieur t’avait choisi5 deux surpuissants parrains :
L’ennemi Charles Quint du royaume de France
Et l’ami Soliman en bonne intelligence,
Tu sauras les choyer fort tôt ces suzerains.

Oriane siéra à ta pureté blonde,
Tout Amadis6 errant ou non fondra pour toi ;
Shéhérazade aux yeux bleus sur les lys des rois,
Persane contera mille nuits vagabondes.

0— ? (pour le moment)
1— Au sens de procession, défilé.
2— Dans ses Métamorphoses, Ovide développe la légende d'Acis et Galatée sur un ton dramatique : la nymphe aime le berger Acis grand joueur de syrinx (flûte de Pan) et en est aimée, mais ce dernier est victime de la jalousie du cyclope Polyphème, également amoureux de Galatée, mais disqualifié par ses traits monstrueux.
3— La reine Guenièvre est un personnage de la légende arthurienne, femme du roi Arthur. Sa relation adultère avec Lancelot du Lac et d’autres chevaliers peut-être de la Table ronde est un thème récurrent du cycle.
4— Aude est fiancée de Roland dans sa Chanson, c’est Charlemagne qui lui annoncera sa mort lors d'une attaque surprise des Sarrazins à Roncevaux.
5— Tout au long de ses jeunes années, Mademoiselle de Chartres découvrira le talent l’entregent et l’efficacité de son père à se mouvoir auprès des plus grands de la Terre.
6— Amadis de Gaule (Amadís de Gaula) est un roman de chevalerie espagnol sous la forme de  l'œuvre entre autres de Garci Rodríguez de Montalvo qui fut publié en 1508 à Saragosse. Il s'agit du remaniement d'un texte antérieur dont la datation, la localisation et l'attribution sont fort discutées. L'ouvrage de Montalvo a été adapté en français par Nicolas Herberay des Essarts, dont la traduction a été publiée pour la première fois par Denis Janot, Vincent Sertenas et Jehan Longis en 1540 à Paris.
Amadis est le type de l'amant constant et respectueux aussi bien que du chevalier errant. Accompagné de son frère Galaor et protégé par l'enchanteur Alquif et la fée Urgande, il doit affronter des épreuves innombrables afin de conquérir Oriane à l’immense beauté, princesse et fille de Lisvart roi de Bretagne.

Photo by Marc Kayne

Photo by Marc Kayne

Et bientôt, tous les charmes de cette sorcière blonde enchanteront les Cours de Venise et de France et de tant d’autres lieux aussi magnificents et parfois même plus au moins dans mes délires de mes quinze ans naguère (jadis ?) à tous ceux d’aujourd’hui…

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